Mayotte : vers une version 2 de Wuambushu ? Par Jean-François Charrat

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C’est fait ! Le ministre de l’Intérieur a annoncé la fin du droit du sol à Mayotte. Comme si cette mesure, dont il n’est pas sûr qu’elle ne soit pas jugée inconstitutionnelle par un conseil de vieux sages désignés, était une solution à tous les maux dont souffre le 101ème département français. Les Mahorais n’en peuvent plus de cette immigration comorienne qui s’apparente à une invasion. C’est de leur survie dont on discute dans les salons feutrés des ministères depuis plus de 30 ans. Parce que cela dure depuis plusieurs décennies sans qu’aucune mesure de fermeté n’ait été engagée. Le flux migratoire inter îles est une réalité dans l’archipel des Comores, dont Mayotte est partie intégrante géographiquement. Contre l’avis des autres Comoriens et de l’ONU, par référendum, les Mahorais ont décidé en 1973 de rester français. L’indépendance des trois autres îles a créé un schisme dont se serait bien passé le peuple mahorais. En effet, la France, dans son souci d’embellir la vie sur les territoires de la République, a enclenché une politique de construction et de développement économique du petit archipel. Cette volonté politique s’est accompagnée parallèlement d’une aide financière très conséquente au nouvel état de la République Fédérale Islamique des Comores.

Manifestement, il faut se rendre à l’évidence, cela n’a pas eu l’effet escompté. Du côté des Comoriens, l’attractivité de cette île en plein essor a fait des envieux. D’autant et malgré les aides très généreuses des pays arabes et de la France, l’état comorien n’a pas vraiment réussi à redonner à sa population le même confort que l’île voisine. Des difficultés à se nourrir, une absence totale de vision politique ajoutées à une corruption endémique et on comprend immédiatement les raisons de cette poussée immigrationniste. Les Mahorais ont d’abord accepté cette manne qui venait enrichir leur quotidien. Les Comoriens sont travailleurs et habiles. Mais très vite, la submersion a été telle que, par exemple, l’hôpital de Mamoudzou est devenu le siège de la première maternité de la République française en termes de naissances. Les Comoriens qui travaillaient (ou pas d’ailleurs) à Mayotte ont fait venir leurs épouses pour y accoucher, rendant ainsi inexécutables les expulsions du territoire. La submersion s’est transformée en invasion car le nombre de reconduites à la frontière s’élevait à 6507 en 2022 (chiffre officiel), pour un afflux de plusieurs dizaines de milliers d’immigrés. Quand on met en perspective le nombre réel d’étrangers en situation irrégulière, il n’y a pas de quoi pérorer. Dans les années 1990, on estimait cette population irrégulière à environ 25% de la population totale. Aujourd’hui, d’après les députés du département mahorais, le taux est proche de 100%. Autant de Mahorais que de Comoriens vivent sur 374 km². Estimée à plus de 400 000 habitants, cette population ne peut plus vivre sereinement. Cela en fait le département français avec le plus fort taux de croissance démographique (3,8 % par an) et même la plus forte croissance démographique de tout le continent africain.

D’un côté le développement économique et social a continué à progresser et, de l’autre, les arrivées massives de Comoriens, qui bien souvent ne parlent pas le français, ont fini par créer un climat de guerre civile. Les Comoriens oisifs à la recherche de la moindre parcelle de terre, de la moindre nourriture ou d’une vie qu’ils croient meilleure, squattent bangas et terrains des Mahorais. Ils n’ont d’autre choix que d’exercer des rapines pour survivre sur un territoire bien trop petit pour accueillir autant de monde. La sécurité, malgré la croissance des effectifs de gendarmes et de policiers affectés sur le département, n’est plus du tout maîtrisée. Et la volonté politique dans tout ça ?

Face à ce déferlement incessant d’envahisseurs, l’état français est en apnée législative. En acceptant comme 101ème département un territoire qui rencontrait déjà des problèmes de sécurité à sa frontière et en appliquant les mêmes règles constitutionnelles qu’en métropole, l’état français n’a fait qu’accélérer le contraste entre une terre en plein essor et des malheureux qui veulent avoir leur part du gâteau. Il ne fallait pas être grand devin pour comprendre qu’à court terme, les antagonismes allaient se transformer en batailles rangées. Depuis plus de trente ans, les quartiers « comoriens », des « réfugiés » et autres squats fleurissent à Mayotte. On a laissé faire, sûrement au nom de cette sacrosainte conscience droit-de-l’hommiste dont une certaine élite politique se gargarise. On n’a pas renvoyé les mères qui accouchaient à Mamoudzou et ceux qui se déclaraient le père. Ils ont fait souche et ont continué à procréer, favorisant ainsi une submersion des écoles et des infrastructures économiques et commerciales. C’est ainsi que la problématique de l’eau potable et de l’assainissement a franchi un cap insupportable pour la population. Mayotte a toujours connu une pénurie d’eau potable. Elle est une constante d’un territoire qui ne connaît que deux saisons. Il est difficile de retenir l’eau des pluies diluviennes de la saison chaude pour en constituer une réserve durant la saison sèche. Les coupures étaient fréquentes par le passé, mais gérables au quotidien. Le niveau de consommation est devenu aujourd’hui impossible pour une population qui a doublé en 20 ans. Certaines semaines, l’alimentation en eau n’intervient qu’un seul jour pendant quelques heures. Les stations d’épuration sont saturées. Pour toutes ces raisons, les problèmes ont entraîné une tiers-mondisation d’une île qui se tournait vers l’essor économique et touristique. Le point de bascule entre le progrès qui apportait il y a quelques années l’espoir d’une vie paisible et confortable pour une population déterminée à demeurer française et l’anarchie est désormais franchi. D’un côté, on s’auto-confine dès la nuit tombée, et de l’autre on fait sortir des barbares pour piller ce qui n’est pas encore protégé. Finalement, deux sociétés se confrontent. L’immigration a fabriqué des villages entiers de gens qui se placent en marge de la République et qui font face à une population qui a choisi de vivre selon des règles bien établies. La cohabitation entre ces deux mondes est devenue impossible.

Et la réponse politique est tout aussi incongrue. Les autobus scolaires sont caillassés, « on n’a qu’à les équiper de vitres incassables », on a des ressortissants somaliens qui entrent illégalement, « on n’a qu’à les embarquer pour la métropole ». Les exemples de naïveté coupable sont légion !

Un retour en arrière s’impose. Depuis 50 ans, les voix se sont tour à tour élevées contre les visées hégémoniques de l’état comorien sur Mayotte. L’un des plus grands et plus beaux lagons fermés du monde exacerbe toutes les convoitises, du simple pêcheur, au magnat du tourisme. Seule entrave à cette tentation, la situation sécuritaire et environnementale de « l’hippocampe ». Ce lagon, brigué pour son rayonnement, rencontre des problèmes insurmontables liés à la surpopulation de l’archipel. Il ne fournit plus la nourriture nécessaire à la survie des Mahorais depuis l’arrivée en masse d’immigrés. Mais il se dégrade et sa barrière de corail est en train de mourir à cause d’une absence de volonté claire de la protéger. L’augmentation des effectifs de protection de la nature est inversement proportionnelle à la surpopulation immigrationniste. Il en est de même pour l’accès aux soins, l’accès à la propriété, l’accès à l’éducation et à la sécurité. C’est un château de carte qui s’effondre de manière inéluctable. Les Mahorais, et plus précisément les femmes mahoraises qui ont été à la pointe de toutes les luttes sociétales depuis l’indépendance des Comores, veulent juste survivre à un raz-de-marée illégal d’étrangers. Cette population sans histoire n’a jamais vécu repliée sur elle-même, mais aujourd’hui, elle est spoliée de ses maigres ressources. On ne peut que leur donner raison quand ils décident de bloquer le territoire pour faire entendre leurs revendications. Il y a des dispositions à prendre immédiatement :

  • à l’extérieur, bloquer les voies maritimes au départ de Anjouan, Mohéli et Ngazidja ;
  • à l’intérieur, décréter l’état d’urgence ;
  • interpeller toutes les personnes incapables de justifier d’une identité française et les renvoyer vers les Comores, par bateaux spécialement affrétés ;
  • détruire toutes les constructions illégales et reprendre possession des champs occupés de manière sauvage ;
  • construire un Centre de rétention administrative de grande capacité pour accueillir les migrants en attendant de les expulser ;
  • supprimer toutes possibilités de recours contre l’état français quand on ne peut pas justifier d’un statut de réfugié ;
  • appliquer strictement et fermement les lois concernant l’entrée et le séjour des étrangers.

Voici quelques mesures qui pourraient être mises en œuvre immédiatement. La suppression du droit du sol annoncé par le ministre de l’Intérieur est un écran de fumée motivé par la peur d’une véritable guerre civile dans un territoire qui a voté à plus de 95% pour le statut de département. Viscéralement attachés à la France, les Mahorais ne doivent pas être pris de haut par le pouvoir central. Ils savent que supprimer le droit du sol à Mayotte conduira le Conseil constitutionnel à devoir se prononcer sur une modification de la Constitution. Quelques « vieux sages » décideront vraisemblablement, comme ils l’ont fait récemment, de rendre inconstitutionnelle une telle disposition, même contre l’avis du peuple. En attendant, le gouvernement aura réussi à gagner quelques semaines pour trouver une autre piste pour un retour au calme précaire.

Cette crise existentielle n’est pas finie. Depuis six mois, les Comoriens facilitent l’arrivée de leurs congénères de Somalie, du Rwanda ou du Congo. Plusieurs milliers ont déjà pris leurs quartiers à Mayotte. C’est bientôt toute l’Afrique de l’est qui s’invitera sur le département mahorais, avec son lot de violences qui s’exercent déjà sur une population qui ne demande qu’à vivre en paix. En ouvrant ainsi les portes de l’Afrique, la France ferme les yeux sur les souffrances du peuple mahorais.

Tant que la France se souciera aussi peu de la volonté et des choix de ses ressortissants, le fossé se creusera entre les politiques et les Français. Mayotte n’est que l’arbre qui cache la forêt car la même situation est en train de se développer sous nos yeux en métropole et nos élites continuent à débattre du sexe des anges. Gardons l’espoir que le ministre de l’Intérieur dans quelques semaines annonce un Wuambushu 2, à moins qu’il ne soit déjà trop tard…

Jean-François Charrat, ancien officier de la Gendarmerie nationale, Responsable du Pôle Réseaux locaux de Nouvel essor français